Publication du rapport « La négociation collective en 2021 »

La Direction générale du travail a publié le 27 septembre dernier le bilan 2021 de la négociation collective en France. Je reproduis ci-dessous :

  • L’avant-propos de Pierre Ramain, directeur général du travail ;
  • Quelques schémas issus de la synthèse de ce rapport ;
  • Et les pages liminaires du rapport présentant les grandes lignes du bilan chiffré de la  négociation collective en 2021.

Pour accéder à l’intégralité du rapport, cliquer ici. Pour accéder à la synthèse de ce rapport 2021, cliquer ici.

Je commenterais dans quelques jours, en différents billets de blog, les principaux résultats de ce bilan 2021 de la négociation collective en France contemporaine.

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Avant- propos. « Après une année de recul lié à l’épidémie de la Covid-19 pendant laquelle l’agenda social a été perturbé et s’est concentré sur la négociation d’accords visant à faire face aux conséquences de la crise sanitaire, l’année 2021 est marquée par une reprise des négociations.
Le bilan de la négociation collective de 2021 revient en détail sur cette reprise. Le nombre d’accords collectifs de branche est repassé au-dessus de la barre symbolique du millier, avec 1 063 accords conclus en 2021, dont six nouvelles conventions collectives nationales. Le volume d’accords d’entreprise connait, quant à lui, un léger regain, qui devrait être confirmé en données consolidées, mais demeure en-dessous du record de 2019, signe que les effets de la crise sanitaire continuent à se faire sentir. En 2021, comme en 2020, le dialogue social a été un levier essentiel pour permettre aux partenaires sociaux de faire face à la crise sanitaire et à ses conséquences économiques, sociales et organisationnelles.
La vitalité de la négociation collective a été encouragée et accompagnée par les pouvoirs publics. On pense évidemment à l’accompagnement des négociations salariales de branche au second semestre 2021, mais également à l’accompagnement de la transposition de l’accord national interprofessionnel du 10 décembre 2020 dans la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, qui consacre d’ailleurs une place centrale de la négociation collective sur les sujets de santé et sécurité au travail.
L’État a encouragé cette dynamique en élargissant le champ de la négociation collective à de nouveaux sujets comme l’environnement ou en confortant des politiques de soutien aux entreprises et aux salariés par le biais d’accords collectifs comme le dispositif Transitions collectives pour la  formation professionnelle ou en matière d’épargne salariale.

Il l’a également fait en faisant reposer la régulation des relations entre les plateformes et les travailleurs qui y recourent sur le dialogue social. Cette confiance a motivé la construction d’un cadre de représentation collective des travailleurs indépendants des plateformes de la mobilité permettant d’associer ces travailleurs à la détermination collective de leurs conditions de travail et des garanties dont ils bénéficient dans l’exercice de leur activité professionnelle. L’État est resté mobilisé pour encourager la conclusion d’accords collectifs :
• En poursuivant le travail d’appropriation des dispositions législatives en matière de droit conventionnel par les acteurs locaux et nationaux, avec l’appui des services déconcentrés du ministère, des observatoires départementaux du dialogue social, de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) ou de l’Institut national du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (Intefp).
• En accompagnant, lorsque cela s’avérait nécessaire, les partenaires sociaux dans le cadre des commissions mixtes paritaires de branche, qui ont été particulièrement sollicitées en 2021 sur la négociation salariale.
• En accentuant encore ses efforts dans l’instruction des demandes d’extension des accords de branche pour en sécuriser juridiquement la mise en œuvre, tout en poursuivant avec succès les efforts engagés au second semestre 2020 pour réduire les délais d’extension.
Au-delà de la dynamique quantitative, l’analyse qualitative du contenu des accords qui figure dans ce bilan confirme également que la négociation collective est un levier essentiel pour permettre aux entreprises, employeurs et salariés de s’adapter face aux grands défis auxquels nous sommes confrontés : crise conjoncturelle, mutations économiques et démographiques, transition écologique, transformation des métiers, etc.
Nous constatons ainsi, en 2021, un regain de l’activité conventionnelle en matière de salaires dans l’ensemble des branches professionnelles : après avoir accusé un fort ralentissement en 2020, cette thématique de négociation, la plus abordée par les partenaires sociaux, est repartie à la hausse du fait de la reprise économique, avec 377 accords et avenants conclus. L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, au second rang des thématiques les plus abordées, progresse également.

Au niveau des accords d’entreprise, c’est la percée significative de la thématique des conditions de travail, y compris dans les plus petites d’entre elles, liée au développement du télétravail, qui témoigne de cette réactivité de la négociation. Et l’année 2021 reste évidemment marquée par la poursuite des négociations de branche et d’entreprise liées à la crise sanitaire et à ses conséquences économiques et sociales.
Suspendu du fait de la crise sanitaire, le chantier de la restructuration des branches a été relancé en 2021 pour achever notamment la fusion des branches couvrant moins de 5 000 salariés inscrite à l’agenda de la sous-commission de la restructuration des branches de la Commission nationale de la négociation collective, de l’emploi et de la formation professionnelle (CNNCEFP). Les travaux conventionnels de rapprochement et d’harmonisation des conventions collectives fusionnées se sont également poursuivis, avec la conclusion d’un accord de fusion et de trois nouvelles conventions collectives couvrant chacune plusieurs branches existantes.
Enfin, pour l’ensemble des branches professionnelles, ainsi que pour le secteur national interprofessionnel, des organisations syndicales et professionnelles candidates et pour les services de la direction générale du travail mobilisés dans l’instruction de ces candidatures, l’année 2021 a vu l’aboutissement du précédent cycle de représentativité et l’ouverture du cycle 2021-2024 avec l’édiction des arrêtés de représentativité syndicale et patronale. Ils fonderont, pendant les 4 années qui viennent, la légitimité des accords collectifs négociés.

Avant de vous laisser vous plonger dans ce bilan, une fois de plus particulièrement riche, et vous permettre de mesurer directement le dynamisme du dialogue social dans notre pays, je souhaite remercier toutes celles et ceux qui, par leur mobilisation au quotidien et leur énergie, y ont contribué. »

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(Pages liminaires du rapport 2021)

1. L’activité conventionnelle de branche et d’entreprise reste dynamique malgré le contexte sanitaire
1.1. Une reprise générale de la négociation collective au niveau interprofessionnel et de branche, avec 1 070 accords conclus en 2021
Après un fort ralentissement lié à la crise sanitaire, l’activité conventionnelle de branche repart à la hausse (+ 5 %) tandis que la négociation collective interprofessionnelle est en retrait par rapport à 2020.
Au niveau interprofessionnel, sept accords et avenants ont été conclus en 2021, pour 14 en 2020. Ainsi, un accord interprofessionnel infranational a été signé, pour trois en 2020 et quatre en 2019. Le nombre d’accords nationaux interprofessionnels (ANI) recule également par rapport à l’année précédente avec six accords et avenants conclus, contre 11 en 2020. L’année 2021 a cependant été marquée par la signature de l’ANI du 14 octobre 2021 relatif à la formation professionnelle « pour adapter à de nouveaux enjeux la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ».
Au niveau de la branche, après un net recul en 2020 suite à la pandémie de la Covid-19, le volume d’accords conclus est en hausse, avec 1 063 accords en 2021 contre 1 013 en 2020. Il retrouve ainsi un niveau proche des années 2015 et 2016, respectivement de 1 098 et de 1 033 accords, malgré le contexte de crise sanitaire qui s’est poursuivi en 2021. Parmi ces accords de branche, le nombre de nouvelles conventions collectives nationales (CCN) signées est le plus élevé de ces 4 dernières années avec six CCN signées en 2021, contre deux en 2020, une en 2019 et quatre en 2018. Par ailleurs, trois avenants de mise à jour d’une convention collective ont été conclus, contre deux en 2020.

1.2. La négociation d’entreprise est stable avec 76 820 accords collectifs conclus en 2021
Le nombre de textes conclus et enregistrés en 2021 augmente légèrement de 0,9 % par rapport à 2020 (97 420 en 2021 pour 96 520 en 2020). Parmi ces textes, 76 820 accords collectifs ont été signés et enregistrés, soit un résultat stable par rapport à 2020 (76 650 accords), en données provisoires à concept constant. Cette activité reste néanmoins inférieure à celle de 2019, avant la crise sanitaire, où 80 700 accords avaient été enregistrés.

La nature des textes signés en 2021 se répartit comme suit :
• 74 % sont des accords ou avenants conclus par des délégués syndicaux, des élus ou des salariés mandatés – la part de ces textes progresse de près de trois points par rapport à 2020 ;
• 26 % ont été approuvés par consultation des salariés, cette proportion recule de trois points.

Le nombre d’accords et d’avenants déposés par les entreprises de moins de 50 salariés en 2021 est en retrait de 6 % par rapport à 2020, après une hausse continue depuis 2017. Ce sont 28 260 accords et avenants qui ont été conclus en 2021 pour 30 200 accords et avenants en 2020. Ils portent principalement sur l’épargne salariale (65 %) et, comme en 2020, concernent pour près de la moitié d’entre eux les secteurs du commerce, du transport, de l’hébergement-restauration et des activités de services aux entreprises.
L’approbation à la majorité des deux tiers (46 %) et la signature par l’employeur seul (26 %) constituent les modes de conclusion dominants. Si les délégués syndicaux sont plus représentés que l’année précédente avec une augmentation de trois points (9 % des textes signés), ils restent un mode de conclusion minoritaire.
Le nombre d’accords et avenants dans les entreprises de 11 à 20 salariés est en légère progression avec 5 670 accords et avenants conclus en 2021 (contre 5 370 en 2020) dont 2 060 accords et avenants hors épargne salariale (contre 1 990 en 2020). Parmi ces 2 060 accords et avenants, 40 % ont été ratifiés par référendum.
Concernant les entreprises de moins de 11 salariés, ce sont 13 410 accords et avenants qui ont été déposés en 2021, soit une baisse de 18 % sur un an et 4 % sur 2 ans. Hors épargne salariale, le volume d’accords et avenants signés est relativement stable (3 530 accords et avenants en 2021 pour 3 920 en 2020). 83 % d’entre eux ont fait l’objet d’une approbation aux deux tiers, un taux en forte hausse depuis 5 ans : + 78 points.

2. La hiérarchie des thèmes les plus abordés reste relativement inchangée
Au niveau des branches, la hiérarchie des thèmes les plus abordés dans les accords est, dans son ensemble, similaire aux années précédentes.
L’année 2021 est notamment marquée par un regain de l’activité conventionnelle en matière de salaires dans l’ensemble des branches. En effet, après avoir accusé un fort ralentissement en 2020 suite à la crise sanitaire (290 avenants), le thème des salaires repart à la hausse avec 377 avenants conclus en 2021, restant le thème le plus abordé par les partenaires sociaux. Cette progression de 30 % par rapport à 2020 s’explique par un contexte spécifique : confinements et ralentissement de la croissance économique en 2020 liés à la crise sanitaire, hausse de l’inflation en 2021.
Le thème de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes progresse d’une place, passant devant celui de la formation professionnelle, le nombre d’accords conclus dans ce domaine étant en légère augmentation avec 231 textes signés en 2021 contre 204 en 2020. Le nombre d’accords spécifiques – c’est-à-dire traitant exclusivement ou à titre principal de l’égalité professionnelle et salariale – a lui aussi progressé, passant de 11 en 2020 à 15 en 2021.
La thématique de la formation professionnelle et de l’apprentissage recule, quant à elle, d’une place avec 185 accords de branche conclus en 2021 contre 201 en 2020. Toutefois, comme l’année dernière, cette thématique de négociation reste plus souvent abordée qu’en 2017 (153 accords), du fait notamment de la prise en compte par les partenaires sociaux des diverses évolutions intervenues suite à la loi du 5 septembre 2018 relative à la liberté de choisir son avenir professionnel et aux mesures règlementaires qui l’ont accompagnée. Dans la continuité de 2020, outre les accords portant sur les différents dispositifs et outils de formation professionnelle, une grande partie des accords portent sur l’activité réduite, l’activité partielle de longue durée (APLD) et sur le dispositif Pro-A en 2021.
Par rapport à l’année dernière, l’activité de la négociation collective en matière de protection sociale complémentaire est, elle aussi, en retrait puisqu’elle enregistre une baisse de 31 % par rapport à 2020, passant de 139 à 96 textes. Cette diminution du nombre d’accords s’explique notamment par l’aboutissement de la mise en conformité des accords de frais de santé à la réforme « 100 % santé » (sept accords examinés en 2021 contre 62 accords en 2020).
Pour la troisième année consécutive, le thème des conditions de conclusion est moins abordé, avec 140 mentions en 2021, contre 179 en 2020 et 345 en 2019. Cette baisse significative résulte de l’appropriation progressive par les partenaires sociaux des nouvelles obligations introduites par les ordonnances de 2017 en matière de prise en compte des spécificités liées aux entreprises de moins de 50 salariés (dites « clauses TPE »). De nombreux avenants avaient, en effet, été signés en 2019 afin de compléter les accords conclus sans cette clause obligatoire. Ces derniers sont aujourd’hui moins nombreux, entrainant une baisse globale du thème des conditions de conclusion des accords. Si elles étaient en progression en 2020, les thématiques du contrat de travail et du temps de travail reculent en 2021, passant de 77 textes en 2020 à 53 en 2021 pour la première et de 113 textes à 78 pour la seconde. S’agissant du temps de travail, le nombre de textes conclus reste toutefois supérieur à celui de 2019 (39 accords) et 2018 (50 accords).
Le thème des conditions de travail reste, quant à lui, stable par rapport à l’année précédente avec 26 textes en 2021 contre 25 en 2020.
Enfin, l’année 2021 marque aussi la fin de la baisse continue de la thématique des classifications observée depuis 2016. Avec 27 accords ou avenants conclus sur ce thème, il retrouve un niveau supérieur à 2020 (neuf accords) et 2019 (20 accords

Au niveau de l’entreprise, parmi les 76 820 accords et avenants conclus en 2020, plus de 44 % sont relatifs à l’épargne salariale, 22 % à la durée du temps de travail, 20 % aux salaires et 8 % aux conditions de travail.

L’épargne salariale reste le premier thème abordé dans les accords conclus avec 34 120 textes : ce volume est stable par rapport à 2020 (- 1 point), légèrement au-dessus de celui de 2019 (+ 3 points).
Comme en 2020, le temps de travail est en seconde position devant les salaires en 2021 avec 16 800 accords enregistrés (18 140 en 2020). Même si sa part diminue de deux points par rapport à 2020, l’ensemble des dispositifs d’aménagement du temps de travail mis en place pendant la crise sanitaire suscite un surcroît d’accords sur ces thématiques. La proportion d’accords portant sur la fixation des congés est, elle, en recul (- 15 points) après un pic en 2020, dû à la mesure exceptionnelle de crise permettant à l’employeur d’imposer la prise de congés payés, de les fractionner ou de les suspendre temporairement.
À l’inverse, l’année 2021 est marquée par une part croissante des conventions de forfaits avec 2 570 accords conclus, soit 740 de plus par rapport à 2020 (+ 40 %). Si la thématique des salaires et primes est stable en 2021 avec 15 320 accords enregistrés (contre 15 240 en 2020), elle diminue sur deux ans (- 2 points). Cette tendance à la baisse s’explique notamment par le conditionnement du versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat à la conclusion d’accords d’intéressement.
Avec 6 070 accords conclus en 2021, le thème des conditions de travail passe devant celui du droit syndical et des instances représentatives du personnel (IRP), 3 810 accords en 2020. Impulsés par les conséquences de la crise sanitaire, deux tiers de ces accords (67 %) portent sur le télétravail avec 4 070 accords, contre 2 760 accords en 2020.
Pour les entreprises de moins de 50 salariés, le thème de l’épargne salariale reste également le plus abordé, dans 65 % des textes. Hors épargne salariale, les mentions les plus fréquentes sont le temps de travail (57 %) et les salaires et primes (plus de 23 %). Si la thématique du temps de travail est pratiquement stable (- 0,5 point) par rapport à l’année précédente, celle des salaires et primes est en
retrait de près de trois points.
Enfin, le thème des conditions de travail enregistre une percée significative en 2021 en augmentant de six points par rapport à 2020. Cela s’explique par une croissance continue du nombre d’accords télétravail signés dans les entreprises de moins de 50 salariés avec 850 accords conclus en 2021 contre 530 en 2020 (230 en 2019, 140 en 2018 et 30 en 2017). »

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